Le Oud et les notes Oud

Le Oud et les notes Oud

Le oud et les notes oud en parfumerie

Vous êtes sans doute déjà tombé sur des « parfums au oud » en vous demandant si ce dernier contenait du « vrai » oud…🤔

Si vous avez déjà eu la chance de sentir l’huile de oud « pure », savez-vous de quelle sorte il s’agissait ?

Connaissez-vous les différentes matières utilisées pour recréer les odeurs si particulières du oud ?

Bois d’Agar, Bois d’Aloes, Calambac, bois de gélose, bois d’aigle, Oud ou Oudh (عود en arabe), Gaharu candan (अगरवुड en Malaysie), Agaru (ཨ་ ག་ རུ་ ), Jinko ou jin-koh (沈香 au Japon), Cham Heong* ou Chénxiāng » (沉香 en Chine), Trầm hương ou tram Huong (Vietnam), Mai Ketsana ou Mai Kritsana (ໄມ້ ເກດ ສະ ໜາ en Thaïlande) …

Autant de noms désignant la résine sombre, incroyablement odorante et désormais bien connue que les arbres Aquilaria produisent pour se défendre après des années de blessure et d’infection fongique par des espèces de champignons appartenant aux genres Aspergillus et Penicillium.

On notera le bel hommage de la langue chinoise dans le nom de l’île de Hong Kong qui signifie le « port parfumé » en référence à l’Aquilaria.

Le profil olfactif du oud particulièrement intense et riche est à la fois boisé, animal, vert, fumé, cuir, épicé, fruité, miellé ou même floral.

On retrouve généralement dans les descriptions du oud les facettes suivantes :

▸ animales-phénoliques, musquées ou de grange / ferme 🐴
▸ cuir, fumée, tabac ou encens 💨
▸ résineuse, chaude, balsamique, ambrée ou miellée 🍯
▸ verte, humide, terreuse, amère, fruits mûrs ou fruits séchés 🌴

Dans les années 2000, la tendance du oud dans la parfumerie de niche gagne d’abord en popularité au Moyen-Orient où il est connu et traditionnellement utilisé en fumigation comme encens (bakhour). L’utilisation de cette huile particulièrement coûteuse et à l’odeur puissante, à des occasions ou des cérémonies importantes, est ancré dans les cultures indiennes et moyen-orientales.
Appliqué pur ou mélangé dans une composition parfumée sans alcool (attar) à d’autres essences naturelles comme la rose, le oud semble permettre de se distinguer et de symboliser un statut social qui confère une forme de prestige.

Flirtant avec les odeurs musquées et ambrées, son profil olfactif boisé unique et complexe attire l’attention des parfumeurs occidentaux, menant à son incorporation progressive dans les parfums de niche puis mainstream au cours des années 2010. Dans un marché quasi aseptisé où les notes propres (muscs dits « blancs ») dominent, les parfums revendiquant la présence de oud avec ses facettes cuirées et animales sont presque une manière de s’affirmer et de s’encanailler olfactivement. L’effet de mode fonctionne à merveille et les sorties se succèdent sauvagement.

Au-delà de la présence annoncée et souvent controversée de « vrai oud » dans les parfums de niche ou dits « mainstream », une recherche rapide sur parfumo.com révèle plus de 8000 fragrances incluant la note « oud » dans leur composition. Le résultat d’une requête simple sur ChatGPT annonce que plus de 1000 fragrances incluant le mot « Oud » ont été lancées au cours des 10 dernières années sur le marché qui compte environ 2000 lancements de parfum par an.

L’attrait à la fois exotique et luxueux du oud, son aura spirituelle quasi mystique et le charme animal de ses notes puissantes en font un ingrédient recherché à la croisée des cultures olfactives orientales et occidentales.

Il existe environ 20 espèces d’Aquilaria avec chacune des caractéristiques légèrement différentes en termes de profil aromatique.

Ces différents profils olfactifs peuvent bien entendu varier selon l’origine, l’environnement de croissance et l’âge des arbres infectés.

Aquilaria allagocha : notes profondes, boisées et légèrement animales, avec parfois des facettes fumées et épicées.
Inde 🇮🇳, Bangladesh 🇧🇩, Iran 🇮🇷, Népal 🇳🇵, Vietnam 🇻🇳

Aquilaria mallaccensis : nuances boisées, chaudes et résineuses, avec parfois des notes de fruits secs.
Indonésie 🇮🇩 , Malaisie 🇲🇾, Singapour 🇸🇬, Thaïlande 🇹🇭, Laos 🇱🇦, Vietnam 🇻🇳, Philippines 🇵🇭

Aquilaria crassna : notes boisées subtiles et douces accompagnées de touches légèrement vertes et épicées.
Cambodge 🇰🇭 , Laos 🇱🇦, Thailand 🇹🇭, Vietnam 🇻🇳

Aquilaria beccariana : notes boisées avec des nuances vertes et fraîches
Indonésie 🇮🇩 / Malaisie 🇲🇾 : îles de Sumatra et Bornéo

Aquilaria microcarpa : notes boisées plus terreuses et herbacées
Indonésie 🇮🇩 , Malaisie 🇲🇾

Aquilaria hirta : notes boisées plus douces et moins intenses, avec des facettes parfois florales ou fruitées.
Malaisie 🇲🇾

Aquilaria parfivolia : notes boisées, mais avec une certaine légèreté et des accents peut-être plus frais ou camphrés.
Thailand 🇹🇭, Indonésie 🇮🇩

Seule l’Aquilaria mallaccensis est classée « espèce en danger » par l’UICN en grande partie à cause de la surexploitation pour son bois précieux. Cet espèce est inscrite au programme de protection du CITES alors que d’autres espèces sont toujours menacées après des années de surexploitation, de déforestation et de braconnage.

La production traditionnelle de oud est un artisanat qualifié qui allie tradition, savoir-faire et science. L’infection des arbres Aquilaria peut être naturelle ou induite soigneusement par les producteurs avec des champignons spécifiques. Pour se défendre de cette infection ou d’une blessure, elle aussi naturelle (animaux, intempéries) ou artificielle, l’arbre produit la résine aux propriétés antifongiques et antibactériennes, par réaction de défense et pour empêcher la propagation de l’infection dans le tissu végétal. Ainsi, le oud (résine) s’infiltre dans le bois autour de la zone endommagée, ne formant qu’un, ce qui explique l’appellation « bois de oud » ou « bois d’agar ».

Ce processus demande de la patience car il faut souvent des années pour que la résine se développe pleinement. L’approche artisanale respecte la croissance naturelle de l’arbre et garantit la meilleure qualité de oud, chaque lot ayant un profil de parfum unique basé sur l’âge de l’arbre, le sol et les conditions climatiques.

La récolte du bois infecté est ensuite effectuée en prélevant les parties de l’arbre où la résine s’est accumulée. Le bois de oud est souvent coupé en petits morceaux et parfois broyé pour faciliter l’extraction de la résine ou l’obtention d’huile essentielle par distillation à la vapeur d’eau.

Si le code de pratique de IFRA recommande un dosage maximum de 40%, le facteur coût entre bien entendu en ligne de compte dans la quantité de oud pure présente dans une composition. En fonction de son origine, de sa qualité et sa pureté, de son âge, des fluctuations du marché et des quantités achetées, le prix du bois d’agar peut varier entre 50€ et 300 € le gramme, voire plus pour des qualités exceptionnelles ou des provenances spécifiques.

A l’instar de vins grands crus, le « Kinam » ou « Kynam » d’âge très avancé, est considéré comme l’une des formes les plus précieuses et rares de oud, hautement estimé pour ses qualités olfactives uniques et sa rareté. Cette qualité de bois d’agar est souvent décrite comme ayant des notes boisées, épicées, avec une douceur presque miellée ou vanillée, et une complexité rarement trouvée dans d’autres types de oud. Les rares vieux arbres Aquilaria qui le produisent se trouvent notamment au Vietnam et en Chine.

Au-delà de ses propriétés olfactives et de sa préciosité, la beauté et la poésie symbolisées par ce mécanisme de défense de l’arbre Aquilaria, transformant une agression en une substance odorante précieuse, participe sans doute à l’attrait et la convoitise que le oud suscite à travers le monde.

La rareté et le prix de cette précieuse essence invite naturellement le secteur de la parfumerie et les parfumeurs à reconstituer et interpréter son profil complexe en s’appuyant sur une combinaison de matières naturelles et synthétiques particulièrement complémentaires.

 Les matières naturelles pour un accord oud :
Notes boisées et terreuses : cypriol (nagarmotha), bois de cèdre de l’Atlas, bois de santal, vétiver, patchouli,
Notes de résines et d’encens : olibanum, myrrhe, benjoin, baume du Pérou
Notes ambrées, cuirées et fumées : labdanum, castoréum, civette, goudron de bouleau rectifié…
Notes épicées : cannelle, clou de girofle, safran

 Les matières de synthèse pour un accord oud :
Notes boisées, ambrées et musquées : Norlimbanol®, Kephalis®, Iso E Super®, Ambroxan®, Ambermax®, Amber Xtreme™, Cashmeran®, musc cétone, ambrettolide et divers muscs…
Notes épicées : alcool cinnamique, cinnamaldéhyde, eugenol, safranal, safraléine
Notes cuirées, animales et fumées : Castoreum (repro), Civette (repro), Guaiacol, divers phénols et crésols…

🧪 Avez-vous aussi senti les différentes versions synthétiques reproduisant le bois d’agar ?
Voici quelques suggestions de bases telles des interprétations différentes du oud et de ses multiples facettes (liste non-exhaustive) :

 Du côté de chez Givaudan :
Black Agar Givco® allie des notes d’ambre, d’oliban et des notes balsamiques, évocateur de la fumée du bois brulé en bakhour (encens).

 Du côté de chez Firmenich :
Oud Synthetic 10760 E® initialement appelé Oud (Aloeswood) Blend (F), rappelle l’essence naturelle avec des facettes à la fois de vétiver et balsamiques.
Oud Samrat® contient environ 1% de OUD ASSAFI™ , extrait naturel issu d’une variété appelée Aquilaria Malaccensis, enregistré par Firmenich au CITES pour une utilisation en parfumerie en 2018. Il développe des notes boisées, ambrées, épicées, chaudes et légèrement animales.
Oud Maleki® contient environ 0,5% de OUD ASSAFI™. Il développe des notes boisées, puissantes et animales.
Oud Firbest® contient également des composés d’origine naturelle, développe des nuances boisées, profondes, balsamiques, animales

 Du côté de chez International Flavors & Fragrances (IFF) :
Oud Oliffac® développe des notes douces de tabac et de fruits séchés avec des facettes animales, cuir, de fumées et de mousse.

Les parfumeurs s’appuient sur ces compositions considérées comme des « reconstitutions » ou des « reconstructions » qui enrichissent la palette des créateurs d’odeurs. Ces matières permettent de simuler la complexité des notes oud tout en laissant la créativité s’exprimer, avec une contrainte de coûts « modérée » au regard du prix du oud naturel. Dans la parfumerie moderne, cette contrainte demeure une considération majeure au moment de la formulation d’un parfum. En effet, le grand public n’est pas toujours bien conscient de ce paramètre dans l’équation olfactive, probablement car peu mis en avant par les marques, ou évoqué de façon inversement proportionnelle au story-telling romanesque et fougueux que le oud inspire.

Utilisons-nous du vrai oud dans nos parfums sur mesure et dans ceux de notre collection ?

En effet, nous utilisons dans nos créations de l’huile essentielle de oud en petites quantités 😅 comme par exemple celle en provenance de Thaïlande (Oud Siam) et du Cambodge.

En fonction des projets de chaque perfumista, de ses goûts et des matières sélectionnées autour du bois d’agar, nous pouvons chercher à renforcer avec réalisme certaines facettes des huiles essentielles de oud. Le choix des matières naturelles et de synthèse comme expliqué en détail ici s’effectue selon le profil olfactif du oud désiré qui peut être la star au centre du parfum ou tenir un rôle plus en retrait dans la composition.

Certains projets sur mesure sont également l’occasion pour les parfumeurs de travailler une note « oud » unique avec plus ou moins d’abstraction, à l’image d’une peinture non figurative qui s’inspire de la beauté des trésors de la nature pour la traduire avec sensibilité et créativité, et pour les plus audacieux, la transcender dans une oeuvre olfactive.

Le Oud dans nos parfums :

Oud Galant est une eau de parfum concentrée à 18%. Cette création contient 1% d’huile essentielle de Oud Siam.
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